Morgane est une femme aux multiples facettes qui incarne l'accompagnement social avec passion. À 38 ans, cette psychologue du travail déborde d'énergie et d'engagement. Son parcours singulier commence par une orientation vers le commerce avant de se déployer dans le domaine associatif où elle excelle dans l'animation d'ateliers en milieu carcéral et auprès des plus démunis. Forte de ces expériences riches et formatrices, Morgane se réoriente vers la psychologie sociale, sous l'influence inspirante d'un enseignant. Aujourd'hui, notamment en tant que consultante pour Coline Care, elle met à profit son expertise pour accompagner les parcours atypiques vers l'insertion professionnelle, avec une attention particulière portée aux personnes en situation de handicap. Entretien. Comment la maladie chronique a influencé ta vie professionnelle ? Est-ce que tu as des anecdotes à nous partager ?
Au départ, à l’âge de 21 ans, ma maladie a constitué un défi majeur, mais le soutien de mes proches a renforcé ma résilience. Cette épreuve a révélé en moi des ressources psychologiques et des leviers externes, renforçant ma conviction de devenir psychologue du travail. J’ai exploré divers domaines professionnels, évoluant notamment dans le milieu associatif et la réinsertion en détention. Mon parcours singulier m’a conduit à comprendre les défis uniques auxquels chacun peut être confronté, en particulier en tant que malade.
Cette traversée a renforcé ma vocation de psychologue du travail, animée par le désir d’apporter un soutien personnalisé aux trajectoires atypiques, en particulier aux personnes en situation de handicap. Mon objectif ultime est d’aider ces individus à équilibrer leur vie personnelle et professionnelle tout en déployant leur plein potentiel, refusant l’idée que la maladie limite notre valeur.
J’ai rencontré des obstacles et des discriminations, mais aussi des personnes qui ont cru en mes capacités, ce qui a été une chance. Chaque individu, indépendamment des défis de santé, a des compétences uniques à offrir. La maladie, bien que contraignante, peut également être une source de forces uniques et de valeur ajoutée. Trouver du sens à la maladie, comme l’exprime Guylain Mercier dans son livre, est une approche que j’ai également adoptée pour être résiliente. Ainsi, je crois fermement en la valeur intrinsèque de chaque individu, indépendamment des défis qu’il peut rencontrer.
Pour moi, cela concerne la création d’un environnement de travail propice à l’égalité des chances, à la diversité et au respect de chacun, y compris de ses différences et incapacités.
Cela implique la mise en place de politiques, de pratiques et de structures organisationnelles permettant à tous les employés, indépendamment de leur contexte de handicap, de contribuer pleinement au succès de l’entreprise. Cette approche va au-delà des exigences légales d’accessibilité, adoptant une perspective proactive visant à permettre à tous les employés, y compris ceux ayant une RQTH, d’exceller et de contribuer pleinement à la réussite professionnelle et organisationnelle.
Il faudrait des politiques de recrutement inclusives, revisitant les procédures pour garantir l’égalité des chances et promouvoir la diversité. Cela implique des descriptions de postes inclusives et des programmes ciblés pour attirer des candidats avec une RQTH.
Les aménagements doivent être personnalisés, incluant des ajustements d’horaires, des équipements spécialisés, et des modifications d’espace. La formation à l’inclusion doit s’étendre à tout le personnel, avec une sensibilisation aux handicaps invisibles. L’accessibilité physique et numérique est essentielle. Le mentorat, le parrainage, et les conseils de carrière contribuent à créer un réseau de soutien. La flexibilité du travail, incluant le télétravail, devrait être encouragée, car c’est l’avenir et répond aux besoins individuels. Des politiques d’inclusion doivent être évaluées régulièrement pour mesurer leur efficacité, avec une communication adaptée à tous. Le leadership exemplaire est la clé, encourageant les dirigeants à être des modèles d’inclusion, démontrant un engagement réel envers la diversité et créant un environnement où chacun se sent valorisé.
Il y a une discrimination et stigmatisation prédominantes, liées à ma propre expérience. Certains conseillent de ne pas mentionner la RQTH sur le CV, mais je suis en faveur de l’inclusion, pensant que cela permet de mieux cibler les personnes. Les principales barrières comprennent la discrimination, la stigmatisation, les préjugés et les fausses perceptions des capacités. L’accessibilité physique et numérique est cruciale. Les aménagements sont nécessaires, comme des horaires flexibles pour les rendez-vous médicaux. Le manque de modèles de réussite et de communication adaptée sont des obstacles, nécessitant une libération de la parole pour briser les tabous. Les troubles psychiques restent les plus stigmatisés, et les médias ont une part de responsabilité dans cette stigmatisation. Beaucoup hésitent à s’exprimer de peur des conséquences, ce qui reflète un besoin d’ouverture et de compréhension dans la société.
Il y a déjà Coline Care, par exemple. Mais aussi des ateliers de formation, des groupes de soutien entre pairs, des témoignages personnels, et des accompagnements individuels assurés par des psychologues du travail, dont moi-même. Les campagnes de sensibilisation, les événements inclusifs et les partenariats avec des associations peuvent être mis en place. Bien que des référents handicap soient présents, il est parfois constaté un manque de formation, mais cette lacune semble progressivement se combler, ce qui est encourageant. Ce qui me semble aussi essentiel se sont les programmes de mentorat. De plus, je suis convaincue de l’efficacité de l’accompagnement par des professionnels, tels que les psychologues du travail, pour mettre en œuvre des politiques inclusives, former efficacement les managers et les employés, entre autres…
Ce sont les personnes du relais handicap de la fac qui m’ont vraiment aidée à m’accepter inconditionnellement. Ils m’ont traitée comme une étudiante lambda, avec des aménagements tels que des tiers temps, la possibilité de passer des examens dans leurs locaux, et d’autres avantages pratiques. Ces ajustements étaient particulièrement utiles pour gérer la fatigue. De plus, avoir une place de parking dans l’enceinte de la fac m’a évité des contraintes physiques. J’avais un laissez-passer pour entrer sur le campus avec ma voiture, la possibilité de suivre des cours en visio si nécessaire, des délais supplémentaires pour rendre mes devoirs en cas d’hospitalisation ou de rendez-vous, et accès au service de médecine universitaire avec des professionnels compétents tels que des médecins et des infirmières. C’était vraiment une aide précieuse.
Il est indéniable que des progrès sont en cours, bien que leur rythme soit jugé trop lent. Les obstacles évoqués, tels que le manque de formation, de sensibilisation et parfois de volonté des leaders, contribuent à cette lenteur. Cette problématique est liée à une mentalité axée sur la productivité, la proactivité et la compétitivité, qui sous-estime souvent les capacités des personnes en situation de handicap.
Il est essentiel de faire évoluer les mentalités concernant l’adaptabilité du temps de travail, en encourageant le développement des temps partiels, aménageables en fonction des besoins individuels. La gestion de la santé, notamment en cas de maladie chronique, nécessite une considération particulière, on dit qu’être malade chronique, c’est 20 h par semaine, ça il ne faut pas l’oublier non plus. 20 h par semaine si vous bossez 35 h, si en plus vous avez un enfant, voire deux, voire trois. Un mari, une vie de famille, des loisirs et une vie sociale, c’est mort. Vous êtes obligé d’arbitrer.
Les malades chroniques sont confrontés à des choix difficiles, imposés par une société mal adaptée. Il est crucial de créer un environnement permettant aux personnes en situation de handicap d’avoir les mêmes opportunités que chacun, reconnaissant leur capacité à travailler, avoir une vie sociale, une vie de famille et des loisirs, tout en adaptant le monde actuel à ces besoins.
Il existe des avantages significatifs pour les employeurs. En France, la reconnaissance est souvent liée aux diplômes, alors que les personnes en situation de handicap sont capables de gérer des démarches administratives complexes, faire face à l’errance médicale, et maintenir une résilience face à l’imprévu, ils développent des compétences d’agilité, de flexibilité et d’adaptabilité, qui sont pourtant sous-valorisées dans le monde professionnel. Ces compétences sont cruciales pour occuper des postes à responsabilité. Mais tu deviens manager de ton projet de vie, et encore plus que quelqu’un d’autre. Ton projet de santé, ton projet de vie de famille, … Tu es obligé de tout manager.
Les personnes en situation de handicap sont souvent loyales envers les employeurs qui les acceptent inconditionnellement, et c’est quelque chose qui renforce l’engagement, la loyauté et l’image de marque positive de l’entreprise. L’inclusion réelle contribue à renforcer la confiance des employés, réduisant ainsi le turnover et favorisant une culture d’entreprise positive. En répondant aux besoins de la société, l’inclusion apparaît comme l’avenir, offrant un environnement de travail équitable et apportant des avantages culturels, sociaux, économiques, au-delà des responsabilités légales.
Il est crucial de commencer par identifier ses forces, et des professionnels tels que les psychologues du travail peuvent guider les personnes en situation de handicap dans la reconnaissance de leurs compétences et talents uniques.
Définir clairement ses objectifs de vie et professionnels, adopter une approche proactive dans le développement de sa carrière, et favoriser une communication ouverte sur les besoins et attentes sont des étapes essentielles.
Également, s’entourer de personnes bienveillantes. Cette démarche s’applique à tous, mais il est particulièrement important pour ceux qui ont une RQTH ou qui peuvent se sentir vulnérables dans certaines situations. Demander du soutien, que ce soit auprès d’un psychologue, d’amis, ou de la famille, n’est pas un signe de faiblesse, mais une démarche humaine. Il est essentiel que la société comprenne cette nécessité et favorise l’éducation et la sensibilisation, en intégrant ces valeurs dès le plus jeune âge dans les écoles.
Il est essentiel de poser des limites et de maintenir une distinction claire entre la vie professionnelle et personnelle. Évitez de travailler en dehors des heures officielles, accordez-vous des pauses, et trouvez des activités bénéfiques pour votre bien-être, même des activités simples comme cuisiner, tricoter ou simplement ne rien faire. Priorisez les tâches, gérez votre temps efficacement, et pratiquez des techniques de relaxation si nécessaire. N’hésitez pas à demander de l’aide, que ce soit à votre médecin ou à des professionnels tels que des psychologues du travail et/ou des psychothérapeutes. Il est crucial de ne pas se surestimer ni se sous-estimer. Maintenez des relations sociales, écoutez votre corps, engagez-vous dans des loisirs, et déconnectez-vous régulièrement. Et entourez-vous de personnes bienveillantes qui vous soutiennent et vous veulent du bien.
Alors moi mon aspiration elle est assez simple, c’est que j’aimerais pouvoir faire en sorte que chacun, quels que soient ses défis de vie, que ce soit de santé ou autre, puisse réaliser son plein potentiel au travail, tout en aidant les entreprises à découvrir justement la richesse de la diversité et de l’inclusion.
Comme le dit Oscar Wilde, « Soyez vous-même, les autres sont déjà pris », une maxime qui rejoint l’idée qu’il faut rester soi-même et ne pas avoir honte de qui on est.
Et puis comme le dit à juste titre Mathilde co-fondatrice de Coline « suivez vos rêves, car ils connaissent le chemin » (Yobi KAMADA).
Merci Morgane, pour cet échange intéressant et authentique.
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